Vous divorcez et vous souhaitez vendre votre bien immobilier en commun ? En France, plus d’un tiers des couples qui divorcent sont propriétaires d’un bien immobilier. 50% d’entre eux souhaitent le vendre en parallèle de leur séparation. Découvrez ici les bonnes questions à se poser lorsque l’on souhaite vendre une maison ou un appartement commun, afin d’éviter les pièges et les mauvaises surprises.
Est-ce que votre bien immobilier est un bien propre, indivis ou commun ?
Votre régime matrimonial et la date à laquelle vous avez acheté le bien va avoir un impact sur les conséquences de cette vente et les décisions à prendre.
- Bien acheté avant le mariage par les deux époux :
A l’exception du cas (rare) d’une communauté universelle choisie lors de votre mariage, un bien acheté à deux avant le mariage est un bien indivis. C’est-à-dire que l’acte de vente indique la quote part de chaque époux, et ce bien ne rentre pas dans la communauté. Si l’acte authentique d’achat n’indique pas de répartition spécifique, on considère que le bien appartient pour moitié aux deux époux.
- Bien acheté avant le mariage par un seul des époux :
Le domicile conjugal est alors considéré comme un bien propre. En dehors du régime de la communauté universelle, l’époux qui a acquis le bien avant mariage reste l’unique propriétaire. Cependant, ce dernier doit parfois une récompense à la communauté (cas d’un mariage sous le régime classique de la communauté réduite aux acquêts) lors de la liquidation. Cela signifie qu’il doit une somme d’argent à l’autre époux dans le cas où l’argent commun a servi à rembourser un crédit qui courait pour ce bien.
- Bien acheté après le mariage :
Tout dépend ici du régime matrimonial sous lequel vous êtes mariés. Sous un régime communautaire, le bien appartient pour moitié aux deux époux, il est donc commun. Petite subtilité ici, si vous avez investi des fonds relevant d’un héritage, et que cela est indiqué dans l’acte d’achat (notion de remploi), alors cela sera pris en compte lors de la liquidation. Sous un régime séparatiste, le bien est indivis, sur la base des quote-parts de chaque époux indiquées dans l’acte authentique d’achat.
- Bien reçu en héritage après le mariage :
Dans ce cas particulier, peu importe le régime matrimonial, il s’agit d’un bien propre à l’époux qui l’a reçu. Néanmoins, il faut prendre en compte que si des investissements ont été réalisés pour des travaux, cela devra être pris en compte lors de la liquidation, et une récompense peut être envisagée pour l’autre époux.
Faut-il vendre un bien immobilier avant ou après le divorce ?
Si le rachat de la part d’un des époux par l’autre, ou la mise en place d’une indivision ne sont pas des options envisageables, il faut prendre en compte le type de bien et votre régime matrimonial et le type de procédure de divorce engagée, pour savoir quand et comment vendre votre bien immobilier. Dans tous les cas des documents justificatifs vous seront demandés et devront être annexés à votre convention de divorce.
Quelle est la procédure de divorce la plus adaptée à votre situation ? 👉🏼 Répondez à ce formulaire.
Cas d’un bien immobilier commun :
Lorsqu’il y a une communauté, vous êtes obligés de liquider cette dernière dans le cas d’un divorce par consentement mutuel. Cela signifie que vous devez estimer la valeur de l’ensemble des biens communs afin de les partager entre chaque époux. Lorsqu’il existe un bien immobilier dans la communauté, ce partage doit obligatoirement se faire par un notaire, et cela implique donc souvent la vente du bien pour pouvoir le partager. La liquidation d’un bien immobilier amène donc plusieurs frais : ceux du notaire, de vos avocats, mais également un droit de partage. Le droit de partage est un impôt à hauteur de 1.1% de la valeur nette des bien partagés.
À savoir
Par exemple, pour un bien immobilier valant 200 000€ et sur lequel vous avez encore 80 000€ de crédit, le droit de partage est de : ((200000-80000) x 1.1%) = 1 320€.
C’est face à ce point là que certaines personnes se posent la question de vendre le bien immobilier avant de divorcer (plutôt que pendant), pour que la valeur de ce dernier ne soit plus prise en compte dans la liquidation, et donc soumise au droit de partage. En effet, un bien vendu, décorrélé de toute procédure de divorce, est exonéré de taxe s’il s’agit de votre résidence principale, ou soumis à l’impôt sur la plus-value immobilière classique dans le cas d’un investissement.
Cependant, cette méthode comporte des risques et des précautions !
Tout d’abord, liquider la communauté signifie estimer et partager l’ensemble des biens communs. La communauté inclut donc les biens achetés, mais aussi les comptes communs, les livrets,… On parle donc de l’ensemble de la “richesse” que vous avez acquise l’un et l’autre sous la communauté. Si la plus-value de la vente a été répartie sur chacun de vos livrets A par exemple, ou encore une assurance vie, elle devrait apparaître dans vos déclarations demandées par votre avocat lors du divorce pour liquider le régime. Le droit de partage est donc encore d’actualité !
La loi est très claire là-dessus : « le produit de la vente doit, même en l’absence de partage, être inclus dans l‘état liquidatif du régime matrimonial annexé à la convention, ce dernier devant comprendre l’ensemble des biens communs ou indivis du couple » (Rép. min. n° 10159, JOAN 1er sept. 2020).
Il est également important de savoir que les avocats et le notaire sont responsables de l’information fournie aux services fiscaux sur ces droits de partages dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel. Ils ne prendront pas le risque de cacher une plus-value s’ils en apprennent l’existence ! Si vous souhaitez donc prendre le risque de ne pas déclarer la vente d’un bien immobilier commun lors de votre divorce, vous devez donc ne pas en faire mention lors de vos échanges avec votre avocat. Le risque sera donc pris par vous, et vous seul, en sachant que les pénalités en cas de redressement peuvent aller jusqu’à 80% de la somme “cachée”.
Il peut donc être intéressant de vendre le bien immobilier après le divorce, mais cela ne peut se faire que dans deux cas précis :
- Rédaction d’une convention d’indivision
Cette solution a plusieurs pré-requis, le plus important étant une très bonne entente entre les futurs ex-époux. En effet, cela implique de rester propriétaire à deux du bien en indivision, via une procédure chez un notaire (vous trouverez plus de détails sur ce point ici).
Vous pouvez ainsi revendre le bien après le prononcé du divorce, et procéder au partage des liquidités ainsi obtenues sans droit de partage. Il faut quand même bien calculer l’intérêt de l’opération car une convention d’indivision est payante et l’absence d’impôt sur une plus-value immobilière n’existe que sur la résidence principale (donc l’un des époux doit rester habiter le bien jusqu’à la vente).
- Procédure de divorce avec juge
Cette solution est parfois proposée par certains avocats, même si elle va à l’encontre des objectifs de désengorgement des tribunaux. L’idée est d’engager une procédure de divorce pour acceptation du principe de la rupture, appelé aussi divorce accepté. Cette procédure permet normalement à deux époux de déposer une requête conjointe en divorce (les deux sont d’accord sur le fait de vouloir divorcer) et de partager les éléments sur lesquels ils n’arrivent pas à trouver des accords et font appel à un juge pour trancher. Elle a donc deux avantages dans ce cas : les accords trouvés par les époux ne sont pas remis en cause et les époux passent automatiquement sous un régime d’indivision post-communautaire une fois le divorce homologué. Donc pas de partage préalable au divorce nécessaire, pas de frais de convention d’indivision, et la possibilité de vendre après le prononcé du divorce sans payer de droit de partage sur la valeur du bien.
Il faut souligner les désavantages suivants (aucune solution n’est parfaite malheureusement) : la procédure risque d’être plus longue selon votre tribunal de rattachement et les frais d’avocat un peu plus élevés (cela nécessite plus de travail et de déplacement avec le juge). A noter que certains juges commencent à voir d’un mauvais œil cette multiplication de procédure quand la motivation principale est uniquement fiscale.
Cas d’un bien immobilier indivis :
Dans le cas d’un bien immobilier acquis en indivision (soit avant le mariage, soit après mais sous le régime de la séparation des biens), les choses sont plus simples.
Soit vous vendez le bien avant le divorce et vous vous répartissez le prix de cette vente proportionnellement à la quote-part de chacun mentionné dans l’acte d’achat initial. Aucun droit de partage n’est à prévoir et aucune taxe n’est à prévoir s’il s’agissait de votre résidence principale. C’est la solution à préconiser sans hésitation, si cela est possible pour vous.
Soit vous avez besoin de passer par un partage notarié des biens indivis pour déterminer plus exactement votre situation. Cela permet de déterminer précisément les droits de chacun sur les biens et les dettes qui y sont rattachées, établir les comptes d’indivision et enfin définir le partage et le versement éventuel d’une soulte d’un des époux à l’autre pour rééquilibrer potentiellement le partage. Il est important de noter que le notaire, en plus de ses honoraires, appliquera le droit de partage attendu par les services fiscaux. A noter en plus que si un crédit immobilier est toujours actif, et qu’une attribution du bien rattaché se fait à l’un des époux, il vous faudra demander une désolidarisation du crédit (ce qui n’est jamais simple) ou le rachat de votre crédit.
Enfin, vous avez la possibilité de garder à deux le bien immobilier indivis. Vous devrez alors réaliser une convention d’indivision (lien ici) qui a une durée maximale de 5 ans. Selon vos décisions futures, vous retomber soit dans le cas de la vente (sans droit de partage) soit dans le cas d’un partage notarié (avec droit de partage).
Que faire si mon conjoint ne veut pas vendre ?
Cela dépend tout d’abord de la nature du bien immobilier. S’il s’agit d’un bien propre, seul l’époux propriétaire est décisionnaire pour vendre ou non le bien en question.
Il existe néanmoins une exception : le lieu de résidence de la famille. Lorsque l’un des époux est propriétaire en propre du logement familial, tel que défini par les ex-époux lors de leur vie en communauté, il ne peut pas vendre le bien sans avoir l’accord du conjoint (article 215 du Code Civil). Dans le cadre d’un divorce, ce refus peut se justifier par exemple lorsque le conjoint ne peut pas se reloger avec des enfants mineurs en communs.
Dans le cas d’un bien en commun, il est fortement conseillé d’œuvrer pour trouver des accords communs sur la vente d’un bien, car les solutions auront forcément un impact financier négatif sur les époux.
Si l’un souhaite vendre et que l’autre ne peut pas racheter sa part et s’oppose à la vente à un tiers, il faudra passer par une procédure judiciaire afin d’obtenir l’autorisation de vendre le bien. Pour que le juge empêche la vente dans le cadre d’un divorce, il faut prouver que cela va à l’encontre du bien-être et des intérêts des enfants communs. Cette procédure entraînera forcément des frais judiciaires plus importants mais surtout, entraînera une vente aux enchères judiciaires. Cela signifie que les ex-époux n’auront aucune garantie de la somme ainsi obtenue lors de la vente.
Quelles sont les étapes d’une vente immobilière dans le cadre d’un divorce ?
Une fois le statut du bien validé (bien propre, commun ou indivis) et que le choix de vendre est bien validé, il convient de faire estimer votre bien immobilier. Il est conseillé de regarder à la fois de votre côté ce qui se passe sur le marché pour des biens similaires et de contacter une agence immobilière (ou plusieurs) pour avoir une idée assez précise du montant espéré. Notez que certaines agences proposent une première estimation gratuite.
Il est très important de rendre votre bien immobilier désirable. Cela peut impliquer un grand nettoyage, quelques réparations ou petites améliorations, voire une modification qui pourrait avoir un impact majeur sur les décisions des acheteurs.
A vous ensuite de choisir si vous souhaitez vendre avec l’aide d’une agence immobilière ou non. Cela peut être intéressant dans le cadre d’un divorce, car cela permet d’avoir un intervenant “neutre” pour gérer cette étape parfois très chronophage. De plus, les agences sont déjà un réseau d’acheteurs potentiels et seront disponibles rapidement pour les visites : vous pourrez ainsi vendre votre bien beaucoup plus rapidement. Mais cela implique évidemment un coût supplémentaire.
Il faut également prendre en compte le fait que plusieurs documents sont obligatoires pour pouvoir vendre un bien immobilier. En effet, différents diagnostiques seront demandés par le notaire, ainsi que PV d’assemblée générale et les coûts associés si le bien fait partie d’une copropriété.
Dans le cas d’une liquidation, il conviendra donc de tenir informés votre avocat et votre notaire des avancées sur la vente du bien immobilier afin qu’ils prennent en compte la valeur potentielle de la vente et qu’ils vous conseillent correctement sur votre divorce.
Quelles autres options que la vente du bien immobilier peuvent s’offrir à moi ?
D’autres options que la vente simple d’un bien immobilier à un tiers peuvent être envisagées dans le cadre d’un divorce (à condition évidemment que le niveau de communication soit suffisant).
Donation aux enfants
Parfois conseillé par les notaires, cela vous permet de réaliser, en amont de la liquidation, une succession du bien immobilier acheté au départ en commun avec votre ex-conjoint. Cet acte notarié a évidemment un coût mais permet de diminuer le droit de partage associé. Prenons l’exemple suivant pour y voir plus clair : M. et Mme Dupont ont deux enfants et sont propriétaires de leur appartement qui vaut 200 000€. Ils souhaitent divorcer, mais protéger également le patrimoine qu’ils ont constitué pour leurs enfants.De plus, aucun des deux n’a les moyens de payer 100 000€ à l’autre dans le cadre d’une soulte. Une solution envisageable avec notaire est la suivante :
- Une donation de la nue propriété est faite à chacun des enfants ; cela signifie que les époux gardent l’usufruit.
- La valeur de la nue-propriété, estimée ici à 100 000€, est donc répartie entre chaque enfant à hauteur de 50 000 chacun (maximum 100 000€ tous les 15 ans pour être exonéré d’impôt).
- M. et Mme Dupont gardent dont l’usufruit du bien à hauteur de 100 000€ (50 000€ chacun).
- Il est plus simple pour l’un des deux de rester dans le logement en payant une soulte à l’autre à hauteur de 50 000€.
Garder le bien en indivision
Dans tous les cas, nous vous conseillons de faire appel à un avocat dont le domaine de prédilection est le droit de la famille, des successions et du patrimoine, afin d’être conseillé correctement. Le divorce est une étape de vie complexe et il faut savoir se faire accompagner de professionnels de confiance pour éviter de payer le prix de mauvaises décisions à l’avenir.