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Article impact du divorce sur la santé

Inattendu ou prévisible, conflictuel ou cordial, le divorce est une étape bouleversante de la vie. Source de souffrance, même pour celui qui en prend la décision, il aurait un impact néfaste sur la santé.

Pour cet article nous nous sommes intéressés à une enquête danoise et à l’analyse de la thérapeute familiale et conjugale, Marie Baudin.

L’impact immédiat du divorce 

La plupart des études sur le divorce examinent ses effets à la suite d’une longue séparation entre les ex-époux. Mais avec le temps, il est possible de ne plus éprouver les mêmes sentiments ni la même souffrance qu’au moment de la procédure de divorce. Il existe, en réalité, très peu de recherches et de données concernant l’impact immédiat du divorce, soit seulement quelques jours après son prononcé.

Mais le 30 novembre 2020, des chercheurs de l’Université de Copenhague au Danemark ont publié une enquête exhaustive sur les conséquences émotionnelles et physiques immédiates du divorce, dans la revue Frontiers in Psychology. Celle-ci, menée auprès de 1856 danois cinq jours après le prononcé de leur divorce, montre une rapide dégradation de l’état de santé des époux divorcés, comparé à la population générale danoise.

“Il peut y avoir de la colère, de la honte, mais aussi beaucoup de culpabilité“ explique la thérapeute Marie Baudin. Thérapeute systémique de couple depuis plus de 12 ans, Marie Baudin a longuement travaillé sur la notion de culpabilité.“ La culpabilité est liée à la loyauté que l’on a les uns envers les autres. C’est aussi un modèle d’adaptation au couple. Plus je me crois responsable de ce que vit l’autre, plus je vais développer de l’empathie pour lui éviter de la souffrance. Ce “je“ peut continuer d’exister et produire des malentendus, des conflits et des dysfonctionnements même après une séparation” analyse-t-elle, avant d’ajouter, “la culpabilité est une émotion nécessaire au vivre ensemble.”  

Marie Baudin soulève ainsi un point crucial pour comprendre l’origine de la culpabilité : l’empathie. Selon elle, la culpabilité et l’empathie se complètent et sont nécessaires l’une à l’autre. “ La culpabilité permet d’éviter la transgression et va dans le sens de la réparation. Mais en voulant éviter de faire souffrir l’autre et en étant dans cette perpétuelle culpabilité de se croire responsable de la douleur de l’autre, on tombe dans l’engrenage“, explique-t-elle. Ainsi, trop de culpabilité peut influencer les décisions des époux, capables d’abandonner leurs besoins au détriment de l’autre, mais aussi impacter leur santé. 

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Des facteurs décisifs 

Dès le début de leur étude, les chercheurs danois mentionnent les travaux du professeur de sociologie Paul R.Amato sur l’impact néfaste du divorce. Tout d’abord, il y a ce que ce professeur appelle les « facteurs de risque » tels que le faible niveau de vie, la perte d’avantages associés au divorce ainsi que le conflit avec l’ex-conjoint. Ces facteurs peuvent vraisemblablement impacter la santé des ex-époux. À l’inverse, il nomme “facteurs de protection » le fait de rencontrer un nouveau partenaire, de disposer de bons revenus, d’avoir une opinion plutôt positive sur le divorce et d’être à l’initiative de ce divorce. Ces facteurs permettraient quant à eux d’accepter plus facilement une séparation. 

Cependant, comme l’explique Marie Baudin, le divorce peut susciter de la culpabilité “aussi bien chez celui qui est quitté que celui qui quitte”. Et bien que la durée de la relation joue un rôle sur ce sentiment de culpabilité, les jeunes couples n’en sont pas pour autant exemptés, notamment s’ils se retrouvent dans une relation toxique. 

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Accompagnement des couples 

Pour tenter d’accompagner au mieux et plus rapidement les couples divorcés, les chercheurs danois ont mis en place un accompagnement réel et digital, avec la création d’un outil numérique, “Coopérer après le divorce“. Cette assistance permettrait ainsi de réduire les effets néfastes du divorce, à long terme, sur la santé.

Pour Marie Baudin, l’accompagnement des couples est important avant même d’entamer une procédure de divorce. “Les couples ont besoin de déposer leurs reproches, leurs problèmes, leur malaise et tous leurs dysfonctionnements » souligne-t-elle. La thérapeute propose alors trois étapes pour aider les couples à prendre conscience de cette culpabilité : “La première étape, c’est d’essayer de comprendre à quoi ça leur sert que l’un se sente responsable de la douleur de l’autre. La deuxième étape a pour but d’aider les couples à se poser les bonnes questions pour trouver des réponses : Qu’est-ce que je peux faire ? Quelle est ma responsabilité dans mes actes, dans la façon dont je regarde l’autre.  La troisième étape consiste à aider les couples à distinguer les émotions positives et négatives de la relation pour éviter de rester centré sur le rejet de l’autre.”

Enfin, pour dépasser cette culpabilité, la thérapeute recommande un exercice mental, celui d’imaginer une balance avec ses deux plateaux. “Sur l’un, je mets tout ce que je me reproche, tout ce que je n’ai pas fait, tout ce qui est très lourd pour moi et répond à la culpabilité. De l’autre côté, pour faire contrepoids et dépasser le poids de la culpabilité, il s’agit de mettre tout ce qui m’a permis d’agir dans la relation pour l’autre, et aussi pour moi aujourd’hui. Qu’est-ce que j’ai pu faire pour me renforcer ? Qu’est-ce qui fait que j’ai pris cette décision aujourd’hui” conclut-elle.

Ainsi, l’étude danoise et l’analyse de la thérapeute Marie Baudin, loin de nous dissuader de divorcer, s’attachent justement à décrypter la souffrance des époux au moment d’une séparation.  Entre rancœur, procédures juridiques lourdes et garde des enfants, difficile parfois de prendre le temps d’entamer une reconstruction personnelle et conjugale. Mais le divorce est un moment unique et mérite de s’y pencher pleinement avant que la culpabilité ne l’emporte…

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